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The Danish girl : un amour dépassant la frontière des genres

Vu hier en avant-première, ce film s'inspire de la vraie histoire d'amour des artistes danoises Gerda Wegener et Lili Elbe (née Einar Wegener), cette dernière étant la première personne au monde ayant subi des opérations de chirurgie de ré-attribution sexuelle. J'avais déjà vu la bande-annonce, connaissais le nombre de nominations différentes en cours, et je m'attendais à un bon moment cinématographique. J'avais donc une haute attente et elle fut pleinement satisfaite ! 


L'amour et le transidentité

Ce qui a été pour moi le plus marquant dans ce long-métrage c'est, au-delà de la souffrance autour de la transidentité (le besoin de changer de corps, le regard des autres, la torture de la chirurgie...), l'amour inconditionnel de sa femme Gerda Wegener. Malgré sa tristesse, ses inquiétudes, parfois son malaise, elle soutiendra toujours son mari à devenir Lili Elbe. Cet amour absolu est vraiment magnifié ici. Pour rendre compte de ce sentiment incroyable l'actrice Alicia Vikander n'a pas hésité à contacter Leslie Fabian qui a vécu ce changement au sein de son couple et qui en a écrit un livre.
Une réalisation poétique

Tom Hooper a su vraiment sublimer cette histoire unique en son genre (lol. Pardon.) avec des scènes poétiques. Je pense par exemple à celle où Einar va dans un bordel à Paris et imite à travers une vitre les gestes sensuelles d'une fille de joie, ou encore celle où ce dernier s'approprie mentalement la robe d'une danseuse pendant que sa femme peint... Tout est soigneusement maîtrisé et beau. J'ai beaucoup aimé aussi toutes les parties où Einar ou Lili se trouve face à un miroir.


Des acteurs nominés et qui le méritent !

Comme je le disais plus haut, il y a eu une vraie recherche de certains des acteurs pour incarner leur personnage. Eddie Redmayne a fait une enquête sur le vrai passé de Lili Elbe, s'est inspiré de nombreux mouvements des femmes qui l'entouraient. Il n'est pas étonnant que ce dernier et Alicia Vikander soient tous les deux nominés à de nombreuses reprises. Il est à souligné tout de même que les seconds rôles étaient aussi très bien joués : Matthias Schoenaerts joue toujours le chevalier blanc depuis Loin de la foule déchaînée de Thomas Vinterberg, mais que voulez-vous, il est doué pour ça ! J'ai aussi apprécié la prestation de Sébastien Koch dans le chirurgien pionnier et ouvert d'esprit, je l'ai trouvé très juste dans son rôle. Le personnage de Oola Paulson, la danseuse, incarnée par Amber Heard était une touche de couleurs et de fantaisie très agréable.

Seul point négatif au tableau (ahah...) c'est que les tableaux et dessins ne sont aucunement des copies d’œuvres originales de Einar ou Gerda Wegener, j'ai trouvé qu'il était dommage que cet effort ne soit pas fait.

Pour aller plus loin : Le Musée Arken d'Art Moderne à Copenhague organise en ce moment même jusqu'au 16 mai 2016 une exposition autour de Gerde Wegener. On a un aperçu grâce à un extrait de la brochure. Si le succès est au rendez-vous j'espère que cette exposition fera un tour par Paris !

Lili with a feather fan, peint par Gerda Wegener en 1920

A l'affiche : Dheepan



C’est avec impatience que j’ai été voir au cinéma le film Dheepan de Jacques Audiard sorti il y a peu. C’est l’histoire de trois sri lankais fuyant la guerre, un soldat Tamoul, une femme et une petite fille, qui se font passer pour une famille afin d’être réfugiés en France ; on les voit observer et évoluer à travers une cité de région parisienne. J’étais curieuse de connaître la nouvelle création ayant obtenu la Palme d’Or : est-ce que cela vaut le coup ? Mon avis est plutôt mitigé…

Un regard différent et étranger sur la France


J’ai tout de suite pensé aux Lettres Persanes de Montesquieu où deux voyageurs étrangers posent leur regard sur la société française et ses dysfonctionnements au temps de Louis XIV. Bien sûr, nous ne sommes plus sous la monarchie, mais le principe est le même : comment voit-on la France à l’extérieur ? J’ai trouvé que ce parti pris était très intéressant. Cela m’a permis aussi d’être plus touchée par la misère de ces sri lankais ou indiens qui vendent des fleurs dans la rue ; comprendre mieux le vécu de certains de nos immigrés est pour moi assez important, c’est de cette manière que l’on évite la peur de l’autre et le racisme. On peut du coup tout de suite trouver une résonance certaine avec notre actualité avec les syriens… et mine de rien le film reste en suspens au fond de ma tête quand je regarde le 20H.
On peut aussi grâce à cette vision étrangère faire un parallèle entre l’autodestruction des banlieues européennes avec les guerres civiles dans le monde. Les minorités/communautés souffrent du cloisonnement.
Ces trois personnes qui évoluent sur le sol français avec inquiétude vont au fur et à mesure du temps apprendre à s’apprivoiser. Et je trouve que la plus belle citation que l’on peut faire des Lettres Persanes est celle-ci : « Ce ne sont pas seulement les liens du sang qui forment la parenté mais aussi ceux du Cœur et de l'Intelligence ». Ce message que l’on peut sentir à travers le film est beaucoup plus subtil, pour moi c’était la deuxième trame la plus captivante du film. J’aurais d’ailleurs aimé qu’elle soit encore plus mise en valeur !

Un cinéma un tantinet sexiste

J’ai été cependant assez désappointée par cette touche de sexisme que l’on voit un peu tout au long du film. Il y a pour moi deux personnages principaux : l’ancien soldat, Dheepan, et la jeune femme. On connait le vécu et les souvenirs de l’homme mais aucunement de la femme. Et pourtant c’est une question évidente ! On aperçoit à de nombreuses reprises le tatouage en forme de soleil de Yalini, sans en connaître l’histoire. C’était pour moi une assez grande frustration de rester avec mes interrogations. Pourquoi aurait-il plus d’importance qu’elle ?
Pour en rajouter une couche Dheepan joue le rôle de chevalier blanc auprès de cette dernière…

Des disproportions

Je ne pense pas être chauvine mais ça m’a un peu énervé que la France soit vue comme l’enfer sur terre et l’Angleterre un paradis édulcoré. Il y a un manichéisme tellement poussé à la fin de la projection que le manque de finesse en fait un film plus médiocre qu’il ne l’est pendant les ¾ de la pellicule. C’est vraiment dommage !
D’ailleurs on a aussi l’impression que le film est coupé en deux genres bien distincts : jusqu’au deux tiers de la projection nous sommes face à un drame social réaliste où certains plans sont magnifiquement mis en valeur et ensuite on est tout simplement dans un film de cowboy du XXIème siècle (wtf ?!), on se croirait dans Taken. Alors soit Audiard voulait se la jouer américain, soit il était en plein délire. Dans les deux cas il y a un sentiment de gâchis.